Edward Enninful et Giovanna Battaglia réussiront-ils à sauver W ?

Depuis le jour où je l'ai découvert jusqu'en septembre 2010, je dois dire que j'appréciais énormément chaque lecture du magazine W. Appartenant à l'écurie Condé Nast et autrefois dirigée par Patrick McCarthy, cette publication, centrée autour des personnalités qui font les monde de la mode, de la musique et de l'art, m'était rapidement devenue indispensable. Je parcourais avec beaucoup d'attention les sujets que je trouvais à chaque fois recherchés et très instructifs, rien à voir avec certains papiers vains et incessamment renouvelés que l'on peut retrouver dans les autres magazines. Sans parler, des couvertures, au design poussé, très pointues et, il faut le dire, toujours magnifiques à regarder. Il en est de même pour les séries mode qui, pour la plupart, ne manquaient jamais d'audace, de peps et ce, sans jamais tomber dans la surenchère.

(W avant Tonchi).

Puis, mi-2010, on annonce le départ de McCarthy ainsi que la nomination de Stephano Tonchi, alors rédacteur-en-chef de T Magazine (volet mode du New-York Times), à la tête du magazine. Déjà même au temps où il travaillait chez T, il était rare que je sois séduit parce qu'il y proposait. De fait, son travail me donnait toujours cette impression de "mode facile", agencée dans le but de choquer (donc créer du buzz) et bien souvent maladroitement hyper-sexuée et dans le fond, très plate. Ce qui n'a pas manqué d'être patent dès son premier numéro en tant que "Editor of W Magazine".

(Stephano Tonchi).

Pour l'édition d'octobre 2010 en l'occurence, c'est une Kim Kardashian nue, que l'on pouvait retrouver en couverture, la poitrine et les parties intimes, néanmoins cachées par deux espèces de bannières. Par contre, à l'intérieur, les choses étaient différentes : on pouvait tout voir. Poitrine, fesses, etc..Kardashian était complètement dévoilée. Par ailleurs, le design de la cover s'est trouvé complètement appauvri, réduit à un minimaliste des plus fades.

(Kim Kardashian pour W, Octobre 2010).

Qui plus est, les sujets, et ce même sur le site, sont devenus de plus en plus barbants. On ne sent plus cette esprit de mode qui goûte l’inaccessible et emmène au rêve . Il y a toujours ce côté osé, de bouleversement des codes, mais ce n’est tellement pas subtil. Au fil des mois, Tonchi a continué de se démarquer par son manque de créativité, les couvertures se ressemblant de plus en plus, notamment avec ce fond gris peu enthousiasmant qui apparaissait désormais comme un leitmotiv. Nul besoin de préciser donc que j'ai été tellement déçu si bien que j'ai arrêté d'investir dans le W. En effet, je préférais largement dépenser mes sous dans un INTERVIEW, le magazine du photographe Fabien Baron, ex-collaborateur de Vogue, qui ne cesse de me surprendre. D'ailleurs, je n'étais pas le seul. Le mécontentement et, je suppose, la désagréable surprise du lectorat se sont vite manifestés : en un mois, W avait perdu 14% de ses ventes mensuelles.

(W sous Tonchi).

Dans l'optique que W était définitivement vide d'intérêts et alors que je n'attendais plus que les dirigeants de Condé Nast se décident à congédier Tonchi, j'apprends récemment que Giovanna Battaglia (je vous avais déjà parlé d'elle) s'apprêtait à intégrer l'équipe du W en tant que Editor-At-Large. Je dois dire,qu'en tant que grand fan des shoots qu'elles réalisent pour les différentes éditions de Vogue, j'étais assez galvanisé par la nouvelle. En plus de son style personnel, très étudié et presque toujours efficace, elle a cette touche d'onirisme dans son travail qu'elle sait avec beaucoup de finesse ajuster à n'importe quel thème. L'espoir m'est donc peu à peu revenu à me disant que grâce à elle, le magazine comportera quand même quelques éditoriaux qui vaudront le détour voire même des covers.

(Giovanna Battaglia).

(Différentes réalisations de Battaglia pour le Vogue Italie, et le Vogue Japon).

Ensuite, mon enthousiasme s'est davantage affirmé lorsque j'ai su que Edward Enninful deviendrait le prochain rédacteur-en-chef mode de W. Alors Edward Enninful -que l'on peut d'ailleurs voir dans le film "The September Issue", c'est une figure du monde de la mode que j'admire énormément. Déjà, je respecte son parcours. Qu'on ne se mente pas, s'imposer et se faire un nom dans le milieu lorsque est un homme noir, est tout sauf évident. De plus, jusque là Fashion Director pour le glossy anglais i-D, il s'est toujours démarqué grâce à ses séries mode d'une esthétique irréprochable, en phase avec l'air du temps et témoignant d'une vraie vision.

(Grace Coddington et Edward Enninful).

(Réalisation d'Edward Enninful pour le Vogue Italie).
Je suis conscient que sous le joug de Tonchi, dont le licenciement n'est visiblement pas programmé malheureusement, il sera difficile que ces deux-là réussissent, d'un coup de baguette magique, à sortir W du gouffre artistique et de la vacuité éditoriale dans lesquels il est plongé actuellement. Je tiens notamment à croire que leurs pattes sauront se manifester assez rapidement et parviendront nonobstant à rendre à la publication un soupçon d'intérêt...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

je regrette de ne pas avoir été une lectrice de ce magazine auparavant, par contre je lis interview qui est magnifique et inspirant.

LOLA a dit…

A chaque visite sur ton blog, une nouveauté =D

Tonchi est un personnage qui ne m’intéresse pas beaucoup. C'est beaucoup de blabla et peu d'actions en fait. L'erreur monumentale qu'il a fait était d'essayer de rendre le W plus commercial/arty/Intellectuel= Prétentieux.
Il a fait exactement ce que Emmanuelle Alt est en train de faire du VP. L'ancien W, je l'aimais beaucoup car finalement, c'était le seul magazine de mode à faire poser les stars comme des mannequins. Or Tonchi les refait poser comme partout ailleurs...
Un bon rédacteur en chef pour moi est celui qui a la notion de l'image, l'image qui va marquer une génération...et des covers de W qui m'ont marquées, j'en ai à la pelle.

Entre Apparitions dans Gossip Girl et KK en couverture, le règne de Tonchi ressemble a une caricature plus qu'à autre chose (TRY TO HARD)

L'arrivée de Enninful et Battaglia est une bouffée d'air Frais. Evidemment, ils sont hyper talentueux et ont vraiment un univers particulier.

ET YOUPI, j'ai une bonne nouvelle à t'annoncer: Apparemment, leur influence a marché puisque la prochaine Cover avec Beyonce est en rupture totale avec le style Bobo de Tonchi et est plus dans l'esprit de Battaglia/Enninful!

Edward Enninful: l'un des rares Fashion Editor qui fait travailler les mannequins noires lors des saisons d'hiver =D